Le Porte-monnaie, Ali Mansour, Fayard, 2012, 250 p.En l’absence de son père, qui vend la force de ses bras sur les docks de la côte tunisienne, Souleymane fait office d’homme à la maison. Mais sa mère ne lui en est nullement reconnaissante. Des hommes, n’y en a-t-il pas assez dans ce pays ? Elle rêve tant de s’affranchir de leur éternelle domination que sa révolte sauvage s’exerce même à l’égard de son propre fils ! Et lorsque ce dernier est arrêté dans le bus qui les ramène tous les deux de la médina où ils ont fait leurs achats pour l’Aïd, elle poursuit son voyage comme si de rien n’était.
Face au commissaire principal de Tunis, Souleymane, qui en réalité n’a que 13 ans, n’est plus qu’un enfant. Soumis à un interrogatoire, il essaye d’éviter le piège que semble lui tendre chaque question. Mais il n’y a ni bonne ni mauvaise réponse. Il n’y a que la volonté arbitraire d’un homme ivre de son pouvoir, démoniaque, qui prétend réinventer la vie de ceux qui lui tombent entre les mains. Seule l’image de sa grand-mère, aussi aimante que sa mère est brutale, permet à Souleymane de tenir bon.
Souleymane est innocent. Cependant, dans les propos du commissaire, il est sans arrêt question d’un porte-monnaie volé. Serait-ce celui d’où sa mère a tiré l’argent pour payer le bus, et qu’il n’avait jamais vu auparavant ? Et pourquoi sa mère tarde-telle tant à venir au commissariat s’inquiéter du sort de son fils ?
Portrait d’un adolescent héroïque et d’une mère indigne que la soif d’émancipation amène au pire des égoïsmes, Le porte-monnaie décrit l’étouffement d’une société sous les poids de la dictature, de la misère et du traditionalisme.
Ce roman fait partie de la sélection « Coup de Coeur » 2013
Et le commentaire des toulousains:
L’auteur tunisien est fils de docker comme son héros.
Souleymane aîné de 7 enfants va avoir 13 ans, il est un peu le chef de famille avec sa grand-mère. Son père s’absente souvent pour son travail , sa mère personnage étrange, irresponsable, dépressive, est uniquement occupée d’elle-même, de ses visites au hammam avec ses amies, elle n’éprouve aucune tendresse pour ses enfants, s’oppose violemment à sa mère.
Avant son départ pour Gabès, le père remet à Souleymane l’argent nécessaire aux achats de vêtements pour l’Aïd proche. Il doit accompagner sa mère au souk pour y faire ces achats.
Au retour il voit sa mère en possession d’un porte-monnaie bien rempli avec lequel elle paie les places d’autobus. Le drame se noue au moment où deux policiers montés dans le bus accusent le héros du vol sans que la mère ne manifeste quoique ce soit. Arrêté, conduit au commissariat, Souleymane y est la proie d’un commissaire, un fou sadique qui accumule les tortures physiques et mentales auxquelles il résiste en s’évadant par la pensée avec la ferme intention de ne pas faire souffrir ceux qu’il aime.
Les scènes au commissariat alternent avec les chapitres qui montrent la quête de la grand-mère qui cherche son petit-fils là où elle imagine qu’il est : le souk, la sortie d’un cinéma, la plage d’Hammam Lif, l’école .
Les personnages positifs : le père, la grand-mère, l’instituteur s’opposent aux autres : la mère , les policiers et surtout le commissaire symbole de tous les vices de la dictature : arbitraire, cruauté, enrichissement sans limite.
Ce livre appartient à la série de cinq ouvrages sélectionnés par l’Association Coup de soleil pour 2013. Ils ont été commentés et discutés en public à Toulouse le 5 octobre 2012. Ces ouvrages sont proposés comme « coup de coeur » de Coup de soleil pour 2013, vous pouvez les lire et les emprunter dans les bibliothèques et médiathèques toulousaines de Croix Daurade, St Cyprien, Les Izards, Serveyrolles, etc. et à la médiathèque Jose Cabanis, ainsi qu’à la médiathèque de Roques-sur-Garonne