Florence Aubenas, la langue arabe… et Le Quichotte, traduit en castillan moderne
Samedi 20 juin, le supplément « culture et idées » du Monde nous parle du langage. C’est Florence Aubenas, à propos de l’incident de Prunelli di Fiumorbo en Corse (faire chanter les enfants en cinq langues, dont l’arabe, à la fête de l’école), qui présente remarquablement le problème de la langue arabe en France. Elle s’appuie sur l’historien Alain Messaoudi (Les arabisants et la France coloniale, 2015, ENS Editions, 558 p.) pour montrer « La double vie de la langue arabe ». Elle rappelle les préconisations de la commission présidée en 1983-85 par Jacques Berque sur les besoins de langue arabe et d’histoire de l’islam dans l’école française. Quel arabe ? Le classique, mais lequel ? celui, modernisé, des écrivains orientaux du Liban ou d’Egypte ? Ou la darija, langue arabe populaire parlée dans les pays du Maghreb, enrichie pour la radio et la télévision et pour une partie de la presse ? « Ce n’est pas tant [la langue] arabe qui est méprisée que ceux qui la parlent ».
Le même supplément du Monde du 20 juin 2015 nous apprend aussi que Don Quichotte a été « rendu aux Espagnols ». C’est grâce à un traducteur, romancier et poête, Andrés Trapiello, déjà auteur d’une suite au grand roman (A la mort de Don Quichotte pour la
traduction française, 2005), qui y a incorporé sans que personne ne le remarque des textes de Cervantes « traduits » en castillan moderne. Il sort en 2015, avec une préface du péruvien Mario Vargas Llosa, une adaptation en castillan moderne du Don Quichotte, un des premier roman moderne en Europe (éditions successives et augmentées à mesure entre 1605 et 1615). En quelques jours l’éditeur doit mettre sur le marché un deuxième tirage. Les Espagnols se mettent à lire un texte, pour eux fondateur, qu’ils se contentaient de révérer. Rappelons que la première traduction imprimée de la Bible est dans le dialecte allemand de la vallée du Rhin, par Martin Luther (en 1522-1534) : c’est grâce à cela qu’une langue allemande est née. La modernité est une affaire de langue partout dans le monde : langue parlée, écrite, éditée.