Au milieu des nombreux écrits sur les attentats de 2015, nous nous sommes intéressés évidemment aux ouvrages de Smaïn Laacher, qui attire l’attention sur des aspects fondamentaux du problème. https://coupdesoleil.net/blog/smain-laacher-insurrections-arabes-utopie-revolutionnaire-et-impense-democratique-2013/ https://coupdesoleil.net/blog/smain-laacher-2012-dictionnaire-de-limmigration-en-france/
Plus encore, il nous a donné en 2015 sa contribution au Maghreb des livres au cours d’une Table ronde « Ecole et enfants de l’immigration » https://coupdesoleil.net/blog/maghreb-des-livres-2015-le-public-prend-la-plume-islam-et-culture-quelles-specificites-une-table-ronde-sur-lecole/ . Ce connaisseur perspicace du monde de l’immigration vers la France nous autorise à publier un résumé de son article récent du Huffington Post, « Ressentiment islamiste et terreur politique »
http://www.huffingtonpost.fr/smain-laacher/islamisme-attentats-radicalisation-daech_b_8610660.html et nous l’en remercions.
Les attentats de vendredi 13 novembre ont permis à de nombreux experts du terrorisme de nous renseigner toujours plus exhaustivement sur la nature et les contours de ce phénomène. Pourtant, des dimensions fondamentales, jugées insignifiantes, de l’univers social et symboliques de ces jeunes criminels (français pour la plupart) sont absentes des commentaires.
Au moins depuis les années 1995, ces croyants de la terreur sont le plus souvent issus de familles qui (s)’organisent et agissent collectivement dans le choix des cibles et des victimes et bien entendu dans la violence elle-même. Si l’on prend seulement les attentats de janvier et de novembre 2015, certains des terroristes sont liés par des liens familiaux : entre autre, les frères Kouachi et les frères Abdeslam. Proposons quelques hypothèses. Les parents et les pères en particulier ne sont, le plus souvent, que d’un faible recours, voire d’aucun secours pour se poser naturellement en médiateurs (entre la famille et le reste de l’environnement social et institutionnel) et en interprètes de la complexité du monde.
Comme si était absente de ces familles un système éducatif gouverné par une morale de la prudence, de la mise en garde mais aussi et peut-être surtout, d’une morale de la persévérance à bien se conduire. On le voit très clairement, chez ces jeunes criminels, dans leur difficulté à concilier ou réconcilier nationalité (française) et confession (musulmane). Ces jeunes assassins constituent alors des proies idéales pour toutes les idéologies de rédemption se proposant comme autant de solutions radicales pour se délivrer d’une supposée oppression.
Le « soumis à Allah » sera pourvu, plus tard, d’une identité supérieure, de la possession d’une sexualité sans limite, et d’un sens vrai de l’existence. [En attendant il] est incapable de création et de créativité littéraire, poétique, linguistique, scientifique, technologique, etc. L’islam que tente d’imposer par le feu et le sang ce groupe multinational aux allures d’Etat terroriste qu’est Daech est une « religion sans culture » pour reprendre la judicieuse formule du poète syrien Adonis (Violence et Islam, Seuil, 2015).
Le ressentiment islamiste est fondé sur l’absence du pardon (le doute est interdit en islam) et de l’introspection. Les attentats de vendredi 13 novembre ont montré, entre autre, à quel point la haine est renforcée et confortée à la vue d’un ennemi aimant la vie.
Smaïn Laacher