“Quel avenir pour le Moyen-Orient”, Café littéraire animé par Agnès Levallois, avec Gilbert Achcar, Charles Enderlin, Jean-Pierre Filliu, Hyam Yared, le vendredi 2 février 3018:
Le Moyen orient est la région du monde où le plus de facteurs d’instabilité s’accumulent. Comment exister comme peuple, comme nation, dans ce monde « post ottoman » ?L’exigence de droits de la part des peuples s’impose depuis 1949. Les gardiens des statu quo préservent leur rente de situation : rente du pétrole), rente de frontière avec Israël, rente de potentiel terroriste exportable.
Depuis 2011, à l’instabilité politico- ethnique s’ajoutent les tensions sociales, qu’aucun des pays de la région ne prend en compte
Pour Achcar, la région du monde où le plus de facteurs d’instabilité s’accumulent est bien le Moyen Orient : par le nombre des acteurs, mais aussi parce qu’aucun système ne régule l’ensemble. Depuis 2011, l’instabilité politico- ethnique s’est amplifiée vers le social, qu’aucun des pays de la région ne prend en compte. Des oppositions « non violentes » ne sont possibles que face à des régimes gardant un minimum d’humanité, encore possible dans le cas d’Israël, pas dans celui de la Syrie. Sans se laisser aller à de l’optimisme, on peut pratiquer l’espoir, car les nouvelles générations sont partout là, capables de minimiser la violence, en particulier par un travail au sein des armées.
Filiusouligne la rapidité des évolutions récentes. L’exigence de droits de la part des peuples s’impose depuis 1949 dans la région. Les gardiens des statu quo savent qu’ils n’ont plus de marge. Ces gardiens préservent leur rente de situation : rente du pétrole (le mien ou celui de mon voisin), rente de frontière avec Israël, rente de potentiel terroriste exportable. L’exemple clé en est le Sinaï. Croire dans les victoires « anti djihad » est illusoire : sur le territoire syrien stagnent dans des zones que personne ne contrôle quelque 10 000 personnes disponibles pour toute aventure possible. Au cœur des droits des peuples non respectés dans la région : celui des palestiniens. Ce sont maintenant des citoyens qui ont besoin de droits, plus des communautés. Aux médias de montrer la non violence qui se constitue peu à peu et qui n’est pas spectaculaire [voir son livre: https://coupdesoleil.net/blog/filiu-generaux-gangsters-et-jihadistes/
Enderlin rappelle que c’est dès 1969-70 que Israël a soutenu le Hamas. La droite israélienne a pour vision un sionisme religieux, mis en place dès 1979 (traité avec l’Egypte), pour coloniser l’ensemble du territoire. Le cadastre établi en territoires occupés détermine les terres « libres » domaniales et a permis l’installation de 400 000 colons [+ 600 000 isreliens à Jérusalem est]. Personne dans le monde ne soutient aucune solution négociable, sauf le maintient d’une « autorité palestinienne », qu’on soutient seulement en payant ses fonctionnaires de police. Mais la crise monte avec des associations de démobilisés israéliens et de jeunes palestiniens démocrates.
A travers son roman Yaradmet en scène l’autorité patriarcale : comment exister comme peuple, comme nation, dans ce monde « post ottoman ». Au Liban chaque « communauté », sans aucun consensus, entretient une cacophonie de petites dictatures patriarcales. Le film L’insulteillustre l’amenuisement des espaces de liberté intellectuelle. Au cœur du problème, le statut des femmes. On est loin des conquêtes tunisiennes au Liban, où quand même depuis peu une femme peut se plaindre de violences devant un policier, et non pas seulement devant un tribunal religieux.
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