Olivier Le Cour Grandmaison Ennemis mortels, Représentations de l’islam et politiques musulmanes en France à l’époque coloniale,édité chez « La Découverte »
« Pour mieux comprendre la place singulière de l’islam aujourd’hui en France, cet ouvrage étudie les représentations de cette religion et des musulmans élaborées de la fin du XIXe siècle jusqu’à la guerre d’Algérie par les élites académiques, scientifiques, littéraires et politiques.
S’appuyant sur des sources diverses, parfois ignorées ou négligées, Olivier Le Cour Grandmaison analyse la façon dont ces élites ont, pendant des décennies, conçu et diffusé un portrait pour le moins sombre des colonisés musulmans. Pendant qu’Ernest Renan, par exemple, soutient que l’islam » n’a été que nuisible « , Guy de Maupassant se passionne pour la sexualité prétendument débridée et » contre nature » de ses adeptes […] » (présentation de l’auteur) questions-a-olivier-le-cour-grandmaison/voir(le dialogue de l’auteur avec Pascal Boniface, de l’IRIS)
Olivier Le Cour Grandmaison dialogue en entretien au MODEL 2020 avec Francesca Isidori : il n’est pas un spécialiste de l’Islam mais de ses représentations.L’Islamophobie ne date pas d’aujourd’hui, Il faut aussi cesser de parler de l’Islam au singulier car il y a plusieurs variantes de l’Islam.
Ernest Renan (1823-1883) avance des argument scientifiques pour légitimer ses travaux sur l’Islam, il était professeur au Collège de France et a déclaré à la Sorbonne (en 1883) : « L’islamisme n’a été que nuisible »
(On parlait d’islamisme plutôt que d’Islam à l’époque) Le manuel de Renan était offert aux écoliers méritants.
Maupassant en 1881 est en Afrique du Nord, il évoque l’hypersexualité des musulmans, d’une sexualité contre nature liée à la religion et au cloaque de la famille.Il évoque les femmes entre elles au harem.L’Islam serait une menace pour l’ordre moral et pour la sécurité sanitaire (il serait à l’origine de la propagation de la syphilis). Un danger pour les biens des personnes et l’intégrité des femmes blanches.
Les islamologues d’aujourd’hui sont de pâles ventriloques d’une islamophobie d’antan. Il faut tenter de comprendre le phénomène d’extension, les hommes qui écrivaient sur le sujet à l’époque n’étaient pas pétris de haine et de préjugés, ils écrivaient en tant que « scientifiques ». Il y avait de très rares voix discordantes, dont celle de Mismaert, inconnu de nos jours.Mais il n’avait pas la capacité d’affecter le courant dominant.
L’émir Khaled (1875- 1936), le petit-fils de l’émir Abdelkader, s’est insurgé contre la place des autochtones dans la législation française : ils ne sont pas pensés comme des citoyens mais comme des sujets. (Monique Chaïbi)