Emission de France 5 en deux épisodes avec la participation d’une vingtaine d’anciens « appelés »; l’un d’eux, Michel Bibard, avait témoigné de son activité dans des SAS des Aurès:http://alger-mexico-tunis.fr/?p=784
Nous sommes nombreux à avoir regardé cette émission et les réflexions ce chacun sont bien venues.
Un peu plus d’une dizaine de « classes d’âge » de jeunes français (nés entre 1928 et 1942) ont eu avec leurs familles la peur au ventre : peur de « faire » ou « d’être pris dans » la guerre d’Algérie. Dans les dix années précédant 1955, tous les jeunes gens ont connu la stricte obligation d’un an à un an et demi de « service » : simple ennui compensé par le rite de passage de « devenir un homme ». Après 1962, même ennui du « service » jusqu’en 1997, mais de plus en plus léger, de plus en plus contourné avec ses substituts de la « coopération » et des « objos ».
1954, c’est six années après la fin du rationnement alimentaire, dix ans après la fin de la Résistance ; c’est le début de la société de consommation, avec ses caméras super 8 pour quelques uns, ses transistors pour tous : cela explique que les appelés ne peuvent parler de leur guerre, ni sur le moment ni après, jusqu’à nos jours. Leur monde « algérien » violent et sous-développé, souvent exotique et chaleureux, est à des années-lumière de la France moderne en train de naître.
La peur est ce qui unit entre eux les appelés de la guerre d’Algérie, aux parcours si différents. Mais au delà c’est aussi la peur que partagent les futurs appelés et les planqués, et toutes les familles. Mais aussi les pieds noirs, les futurs Algériens : un même non-dit.
Le double film est excellent, on peut le voir en post-cast de France 5, le télécharger… Au delà de la qualité indéniable, deux remarques : si la part des enfants « musulmans algériens » alphabétisés (en français) est passée de 1/5 en 1954 à ½ en 1962, c’est entre autres grâce aux appelés, particulièrement dans les SAS. C’est en somme la « coopération » qui est née au sein même de la guerre. Une partie du film est consacrée à ces « auxiliaires » militaires que furent les harkis, dont se souviennent plus d’un protagoniste du film. Une des conclusions d’un de ceux-ci : mieux valait cette « bonne défaite » de l’Armée française qu’une « mauvaise » victoire, pour une société française qui ne cesse de purger et de voir ressurgir au sein d’elle-même nationalismes et racismes.
Rappelons que ces soldats d’une guerre sans nom n’ont reçu le statut (et la pension symbolique) d’anciens combattants que tardivement. Une association « 4ACG » http://www.4acg.org/-Qui-sommes-nous-Contacts-Adhesions-propose à ces anciens militaires de reverser cette pension pour mener des actions de développement, en particulier en Algérie (Claude Bataillon)