Mehdi Lallaoui, En finir avec la guerre
En finir avec la guerre, Une série réalisée par Mehdi Lallaoui
Le coffret est édité par Au nom de la mémoire/ Mediapart
50e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie- 2012
C’est en 2014 que ce coffret de cinq films en DVD (d’environ 50’ à une heure chacun) est diffusé.
1- Porteur d’espoir, construit autour du « porteur de valises » Jacques Chabry, comédien. Film remarquablement organisé, servi par la qualité de jeu de Chabry, entre tragique et comique, sans trace de langue de bois. Lui plus que les autres protagonistes explique précisément ce qu’était l’action de la Fédération de France du FLN : la collecte de « l’impôt révolutionnaire » auprès des algériens immigrés en France, la circulation des militants à l’intérieur de la France et vers les pays européens, la rédaction des dossiers de presse
destinés aux instances internationales. La poignée de militants français « porteurs de valises » se sentait intégrée fraternellement à ces tâches, même si la répression contre cette lutte était beaucoup plus violente contre les Algériens que contre les Français, bien plus libres de leurs mouvements. Cette répression a abouti à l’automne 1960 au procès contre le « réseau Jeanson », dont le manifeste des « 121 » intellectuels qui se sont déclarés solidaires de ce réseau est décrit ci-dessous.
2- Les parfums de ma terre est organisé autour des souvenirs d’un pied-noir de Guelma, d’origine maltaise, Jacky Malléa, chaleureux et parlant vrai. Cela commence avec un coup de sonde dans les souvenirs de la tuerie de 1945 dans cette région (voir à ce sujet Jean-Pierre Peyroulou Guelma, 1945 Une subversion française dans l’Algérie coloniale, Coll. TAP / Études coloniales (La Découverte, 2009) ; Marcel Reggui, préface de Jean-Pierre Peyroulou, Les massacres de Guelma, La découverte, 2006). Guelma fut ainsi le lieu d’une transgression précoce des règles de cette colonie républicaine que fut malgré tout l’Algérie. Mais surtout le film décrit le retour à Guelma du héros qui nous fait découvrir ce qui est généralement occulté au plus profond des mémoires des Pieds-noirs comme des Algériens d’autrefois : la présence de « métis » issus d’unions des deux « communautés ». Ici un cas où l’on passe du non-dit à l’acceptation apaisée, pour une situation qui dans l’hexagone est devenue courante.
3- En finir avec la guerre tourne autour de l’association 4ACG (Association des Anciens Appelés et de leurs Amis Contre la Guerre). On sait à quel point l’immense majorité des « Appelés » se sont tus, décennies après décennies, incapable de dire à leurs proches ce qu’ils avaient vu ou fait pendant leur séjour de service militaire en « maintien de l’ordre », parfois plus de deux ans de leur vie. Les 4ACG consacrent leurs pensions (souvent symboliques) d’ « anciens combattants » à des actions de solidarité et de développement, essentiellement en Algérie. Leur présidente d’honneur est la veuve du général De Bollardière.
4- Le manifeste des 121 fait revivre, au moment du procès des « porteurs de valises » de l’automne 1960, l’effervescence au sein des intellectuels de gauche : une réaction morale plus que politique, d’indignation contre l’armée française (et contre l’Etat français) et non pas seulement contre la guerre dont à ce moment là l’immense majorité des Français souhaite la fin… sans savoir par quel moyen. Ces intellectuels se souviennent d’une action collective improvisée, payée plus cher par ceux qui travaillaient dans le monde de la presse et du spectacle que par les fonctionnaires d’un Etat qui ne voulait pas en faire des martyrs.
5- Vu de l’autre côté donne la parole à des militants du FLN : ils soulignent que leur ennemi n’était pas « les Français », mais l’armée, et parallèlement les employeurs méprisants et brutaux. Ils remémorent leurs souffrances et leur stoïcisme plus que leur propre puissance dans cette guerre. Ces récits sont parfois datés avec précision, mais souvent les événements sont plus flous, si bien que le cadre chronologique donné, année après année, par l’historien Mohamed Harbi, s’adapte mal à ces témoignages. Espérons que Harbi nous donne un jour son histoire de la Fédération de France du FLN (si bien évoquée ci-dessus dans Porteur d’espoir), dont il faut se souvenir qu’elle a été beaucoup moins décimée que les wilayas de « l’intérieur » et qu’elle a pour l’essentiel assuré le financement qui a permis de vivre aux diplomates du FLN comme aux deux armées des frontières, tunisienne et marocaine.
Sélectionner une page