GARDEL Louis La baie d’Alger, Seuil, 2007
C’est fini. L’Algérie, c’est fini.’ Telle est la certitude qui s’empare du narrateur tandis qu’il contemple le coucher du soleil sur la baie d’Alger. Nous sommes en 1955, il a 15 ans, la décolonisation n’est encore qu’une rumeur lointaine et un peu abstraite : l’Indochine, la Tunisie… Il vit avec sa grand-mère, Zoé, qui l’a élevé seule après le départ de ses parents pour le continent, à la Libération. Elève au lycée français d’Alger, il fréquente la jeunesse dorée, mais aussi les notables, au premier rang desquels André Steiger, le chef des colons à Alger, ami de longue date de Zoé. Rien ne semble devoir troubler cette adolescence heureuse et protégée, mais l’ombre des ‘événements’ d’Algérie met du sable dans les rouages de sa vie quotidienne. André Steiger est assassiné par les fellaghas ; au lycée, un professeur de lettres démissionne, un autre, ami de Sartre et de Beauvoir, se tue en voiture dans des circonstances mal élucidées ; sur les plages de Surcouf, les belles se défilent les unes après les autres, les flirts du narrateur tournent court. Malaise. En réalité, c’est à la disparition progressive d’un monde, le sien, dont le narrateur est le témoin tour à tour insouciant et inquiet. Et quand il fête l’anniversaire de Zoé sur les balcons de la demeure algéroise, on se bat déjà dans la casbah. Partir ou rester ? Le jeune garçon quitte l’Algérie pour faire hypokhâgne à Paris. Malgré l’indépendance, en 1962, l’exil ou la disparition des amis, Zoé, elle, a choisi de rester (Allouache, cinéaste algérien en a tiré un film)