« LE CROQUIS DU DESTIN » de Habib Mazini (éditions Broc Jacquart, Maroc, 2016)
Ce livre vaut ou aurait pu valoir mieux que ses apparences, d’abord au sens le plus matériel du mot : une édition peu soignée et très peu professionnelle, un titre grandiloquent qui ne signifie rien et surtout une très vague intrigue policière, qui en fait tout sauf un « polar haletant » quoi qu’en dise la quatrième de couverture. A dire vrai il n’y a même pas du tout d’intrigue en ce sens que les lecteurs savent d’emblée ce qu’il en est, ainsi que le Commissaire Hamidi chargé de l’enquête.
Et pourtant, on lit ce petit livre pas très bien écrit avec beaucoup de plaisir et d’intérêt, pour plusieurs raisons. L’action se passe dans la ville de Casablanca (Tanger aussi se trouve évoquée, mais très peu). Et la représentation qui en est donnée est un très grand atout pour ce roman, ne serait-ce que par sa variété. En effet on y voit aussi bien des cafés mal fréquentés, voire du genre bouge, d’autres nettement plus convenables, un grand hôtel fort bien tenu et surtout nombre de ces beaux immeubles des années 20 à 30, qui font très légitimement la célébrité architecturale de la ville, dans le style qu’on appelle « art déco ».
Le sujet même de l’intrigue, puisqu’il y en a une, policière ou non, est tout à fait astucieux et paraît original, assez différent en tout cas des faits divers politico-sordides auxquels on n’est que trop habitué. C’est d’une œuvre d’art qu’il s’agit, et comme son auteur n’est rien de moins que le très grand Delacroix, on imagine sa valeur. Etant au courant de son existence (par ailleurs inconnue de tout le monde) des galeristes canadiens à court d’argent décident de la récupérer avec l’aide d’un jeune Casablancais Mehdi, non sans quelque tromperie pas très jolie, car le jeune homme croit aux promesses frauduleuses qui lui sont faites en échange de ce vol. Malheureusement les choses tournent mal et Mehdi est amené à tuer le vieux juif qui possède le tableau.
Le commissaire ne se laisse pas tromper par un autre meurtre de juif commis juste après celui-là et qui a de tout autres motivations. On arrive donc assez vite au dénouement, sans entrer d’ailleurs dans les détails de ce qui va s’en suivre et qui n’appartient plus au sujet traité par le romancier. Celui-ci n’en étant pas à son coup d’essai, on peut espérer qu’il mettra bientôt son talent au service d’un livre à la trame serrée et riche de rebondissements vraiment « haletants » !
Denise Brahimi
(cet article provient du site de Coup de soleil Rhône-Alpes http://www.coupdesoleil-rhonealpes.fr/category/lire-ecouter-voir