Editorial

 

Beaucoup de lectures ce mois-ci, pas moins de 5 à 6 récits ou romans, mais pour commencer par les choses sérieuses nous vous proposons 2 essais, variés, qui retiennent l’attention. Celui de Kaoutar Harchi, « Ainsi l’animal et nous » ne peut laisser indifférent car il est une violente mise en accusation des humains trop humains que nous sommes et de notre propension à traiter les animaux comme une espèce inférieure, non seulement indigne du moindre égard mais encore vouée à assurer quotidiennement notre subsistance. Le livre de Emna Belhadj Yahia, « 80 mots de Tunisie », n’est pas à proprement parler un essai mais il évoque avec un très grand art, de manière très proche et très parlante (!) ce cher pays qui est le sien, dans la forme pourtant déplorable et dégradée qui s’y est installée peu à peu depuis 2011 (que certains croyaient pouvoir appeler la révolution de jasmin).
Entre ces deux essais et les deux notes qui vont suivre sont évoqués nombre de romans, mais il n’est pas excessif d’attirer d’abord l’attention sur l’un d’entre eux tant il est atypique, d’une étonnante force poétique jointe à une extrême crudité. Il s’agit d’  «Aménorrhée » dont l’auteure est l’Algérienne Sarah Haidar. D’autres romans sont aussi des œuvres de femmes, par exemple « Je me regarderai dans les yeux » de Rim Battal, histoire d’une émancipation féminine provoquée par l’indignation, ou « Notre dignité » de Nasrine Slaoui qui raconte de manière convaincante le mélange de racisme et de sexisme qu’elle a subi—d’où sa volonté d’écrire « un livre féministe pour les Maghrébines en milieu hostile ».Qu’elles restent droites et gardent la tête haute, comme la belle Algérienne dont la photo (1890) figure sur la couverture de son livre.
Un ouvrage collectif, « Enfance de filles » fait entendre la voix de 22 écrivaines francophones, revenant sur des souvenirs de leur passé. Beau travail accompli par les éditions Chèvre-feuille étoilée, qui nous font le plaisir de nous les montrer toutes en effigie sur la couverture.
Parmi les romans d’homme, « Le coiffeur aux mains rouges » est une histoire de vengeance infligée après l’indépendance à l’OAS, dont le rôle sidérant de violence a laissé des traces indélébiles. Mais dans un genre incontestablement plus léger et plus divertissant, le « Rendez-vous au Mont Saint Michel » d’Ahmed Benzelika nous promène à travers le temps et l’espace de Cordoue l’Andalouse à Ibiza l’île touristique d’aujourd’hui.
Michel Wilson nous dit dans une note tout le bien qu’il a pensé de « La fracture », pièce de théâtre de Yasmine Yahiatène. Et une autre note évoque le travail de Kenza Sefrioui sur « 80 mots du Maroc », riche exploration de la darija ou langue parlée au Maroc, plus savoureuse encore pour qui en a quelques notions.
Et pour finir nous évoquons le film « Alger » qui ne peut que plaire à tout public. Son réalisateur Karim Taleb-Bendiaf a relevé un défi, prouvant par l’exemple qu’un « thriller made in Algeria » est parfaitement possible. Il est vrai que ce thriller, qui vaut son pesant d’angoisse, s’apprécie davantage encore pour ce qu’il suggère du rapport complexe à établir entre la triste période de la décennie noire et celle de l’Algérie d’aujourd’hui.
Denise Brahimi

Ayons un rêve, comme nous y incitait en son temps Martin Luther King, le rêve de Boualem Sansal redevenu libre, au lieu du cauchemar qu’est sa détention d’aujourd’hui. Et à ce sujet, nous vous signalons la Journée d’étude qui sera consacrée à l’impact de son œuvre dans le monde à l’Ecole Normale supérieure de Lyon le 17 mars 2025.

 

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« Et de nous qui se souviendra ? », créé et produit par Nicole Guidicelli, auteure indépendante, est un podcast qui donne la parole aux derniers pieds-noirs. Il est en ligne sur toutes les plateformes d’écoute et de téléchargement (Google Podcast, Apple Podcast, Spotify, Deezer…). 

Hommage à une communauté en voie de disparition, il a pour objectif d’aider les pieds-noirs à transmettre. Il s’adresse à leurs descendants, aux enseignants qui souhaitent parler de la guerre d’Algérie, et plus largement à tous ceux qui s’intéressent aux exils et à la résilience. Il interroge l’exil comme acte fondateur ainsi que les questions d’identité, d’invisibilité et d’intégration. Il pose également la question de la transmission et de la mémoire des pieds-noirs.

Le projet a démarré en janvier 2022, année de commémoration du 60e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie.

Pour écouter les épisodes déjà parus : https://podcast.ausha.co/et-de-nous-qui-se-souviendra

 

 

 

« AINSI L’ANIMAL ET NOUS » de Kaoutar Harchi, essai, Actes Sud, 2024
Cette sociologue, née à Strasbourg en 1987 de parents marocains, a déjà publié plusieurs livres et l’on ne peut qu’admirer sa virtuosité. Elle mêle avec brio une écriture personnelle à une autre plus chargée d’informations, et on la sent motivée par un grand désir d’être persuasive, tant la cause qu’elle défend lui tient à cœur. Cette cause, on l’a compris dès son titre, est de protester contre une certaine vision des animaux, qui consiste à les considérer comme inférieurs à l’homme. Comme elle le dit sous diverses formes, car elle dispose d’un grand nombre de formules percutantes, il n’y a pas en ce monde des hommes et des animaux qui seraient depuis toujours des espèces distinctes, il y a des humanisés et des animalisés, catégories qui se sont forgées peu à peu et qui sont des fabrications, non des données.
Sa position ne peut manquer d’évoquer ce qu’on appelle l’antispécisme, c’est-à-dire le refus de considérer que l’espèce humaine étant supérieure aux autres, elle a des droits qui lui appartiennent en propre et notamment celui de soumettre ou d’exploiter les espèces animales.
Cependant Kaoutar Harchi se méfie beaucoup de ce qui est revendiqué, positivement, comme étant « la raison » (et qui serait le propre de l’homme, justement). Elle n’entreprend donc pas ce qui serait une sorte de démonstration logique, elle croit bien davantage, et elle le prouve, en notre capacité d’être ému voire bouleversé et aussi indigné par la façon dont se manifeste une très profonde injustice à l’égard des animaux, ceux que les humains ont décidé de définir comme tels, avec toutes les conséquences qui s’ensuivent. Elle procède par une succession de ce qu’elle appelle des tableaux, cinq en tout, dont le dernier est très court et l’avant-dernier très long. Et dans son désir de présenter ses convictions sous une forme personnelle, elle évite autant que possible tout ce qui serait les marques d’un ton universitaire : c’est ainsi qu’elle ne parle ni de notes ni de bibliographie mais de références et qu’elle encadre ses tableaux du souvenir récurrent d’un épisode vécu dans l’enfance. Pour rendre les animaux présents dans son livre, elle se livre plusieurs fois à de très longues énumérations qui font apparaître concrètement leur nombre et leur diversité. Et pour revenir sans cesse au scandale des traitements qui leur sont imposés par les humains, elle n’hésite pas à évoquer les torrents de sang animal qui sont déversés chaque jour, à chaque instant, pour ce que nous considérons comme les besoins (et donc les droits) de notre consommation. Si tableaux il y a, ils sont très violemment teintés par ce sang. Elle rappelle qu’un certain fonctionnement de la pensée a consisté à séparer les animaux des hommes voire à les opposer en créant une analogie entre cette séparation et celle de nature et culture, qu’une barre symbolique isole généralement. En vertu de quoi le sang des animaux ne nous concerne pas, et même si nous admettons qu’il y a une souffrance animale elle ne saurait être équivalente à la douleur humaine.
Progressivement et de tableau en tableau s’installe l’idée que la domination sur l’animal a permis de passer par un simple glissement à la domination sur d’autres humains. Le moyen de procéder à ce glissement a été d’opérer leur animalisation, comme on peut le voir dans le cas (que l’auteure privilégie) de la colonisation. Ce passage à l’oppression coloniale rend évidemment d’autant plus nécessaire la dépréciation des animaux. Aux époques où il y a eu des esclaves, il était important que ceux-ci puissent être considérés comme des animaux par leurs maîtres et nombre de philosophes parmi les plus grands ont contribué à affirmer cette possibilité. Dans le cas de la colonisation de l’Algérie, on a de nombreuses preuves de cette animalisation des colonisés. Bugeaud par exemple, lorsqu’il parle de tribus enfermées et enfumées dans des grottes, dit qu’elles l’ont été « comme des renards ».

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De plus, Kaoutar Harchi est animée dans son combat contre le spécisme et le racisme par ses convictions féministes, qui confèrent beaucoup de véhémence à certaines de ses dénonciations : lorsqu’elle rappelle comment fut traitée celle qu’on a appelée la Vénus Hottentote (morte en 1815), elle y voit l’exemple précis d’un sexe féminin et noir qu’on s’est employé à déshumaniser, c’est-à-dire à animaliser. Et elle montre comment, de manière plus générale, le monde blanc en est arrivé à décréter l’animalité des femmes non blanches. Il n’est pas étonnant que les féministes socialistes aient proclamé leur solidarité avec les animaux. Les droits de ceux-ci ont été vigoureusement soutenus par les suffragettes dont ce surnom volontairement frivole ne doit pas minimiser la profondeur et le sérieux.

Kaoutar Harchi analyse le rôle du capitalisme dans l’exploitation des animaux, en prenant pour exemple ce qui s’est passé à Chicago, devenue « la plus grande boucherie du monde » lorsque fonctionnaient à plein rendement les « yards » ou parcs à bestiaux, connectés aux lignes ferroviaires et proposant ainsi un modèle général aux pratiques du monde industriel moderne. Elle se réfère au livre d’Upton Sinclair, « La Jungle », célèbre en son temps (1905) pour avoir montré l’enfer de l’industrie alimentaire ; en sorte qu’apparaît l’idée d’un lien entre ces abattoirs et les camps de la mort, illustrée par l’une des formules frappantes de l’auteur : « Pour les animaux, tous les humains sont des nazis ».

Denise Brahimi

« 80 MOTS DE TUNISIE » par Emna Belhadj Yahia, Collection de l’Asiathèque, 2024


On pourrait s’étonner qu’un livre consacré à des mots du langage courant soit d’un ton aussi personnel que l’est celui-ci, à la limite de la confidence malgré l’évidente pudeur de son auteure.
Les 80 mots de Tunisie qu’Emna Belhadj Yahia a choisis (sans jamais leur consacrer plus de deux pages à chacun) appartiennent à la langue courante usuelle en Tunisie qu’on appelle dérija, étant entendu que chacun des mots qu’elle va commenter est aussitôt suivi de sa transcription en caractères français et assorti de sa traduction. Ainsi a-t-on à la fois le son du mot tel qu’on peut l’entendre dans une conversation entre gens de Tunis et sa signification dont la plupart des lecteurs ont besoin, ce petit livre étant destiné à des francophones puisque écrit en français (tel est le principe de cette collection conçue par l’Asiathèque et qui comporte déjà plusieurs volumes).
Emna Belhaj Yahia évoque d’ailleurs dans le livre son « profond bilinguisme » et le plaisir qu’elle a à faire se rencontrer en cette occasion les deux langues qui lui sont chères. Ce plaisir n’est nullement incompatible, bien au contraire, avec le fait qu’elle n’est pas linguiste. En revanche, apparaissent dans le livre les nombreux centres d’intérêt qui sont les siens et qu’elle met discrètement mais sûrement à contribution dans les commentaires qu’elle consacre à chaque mot.
Elle est assurément écrivaine, d’où le plaisir de lecture que l’on éprouve constamment à la suivre, même si l’on ignore tout de la dérija. Au sein du vaste ensemble qu’est la littérature ses références sont nombreuses, souvent poétiques : côté français, on trouve cités parmi d’autres les noms d’Eluard et d’Aragon ; mais c’est encore plus dans sa propre manière de s’exprimer qu’apparaît le goût pour la poésie : on est sous le charme de ses brefs chapitres consacrés aux fleurs, aux oiseaux ou à l’eau de fleur d’oranger, et il fallait sa sensibilité pour que l’un d’entre eux évoque les délices de la brise par temps de canicule ! Globalement la tendance littéraire qui émane du livre le rattache à un goût proustien pour le passé revécu grâce à quelques sensations dont l’odorat, et ce n’est pas de nostalgie qu’il s’agit mais d’une sorte de reviviscence.
Elle est aussi psychologue, visiblement nourrie de freudisme même si l’utilisation qu’elle en fait n’est jamais théorique, toujours rattachée aux connotations de certains termes pour ce qu’ils donnent à sentir ou à deviner. Il fallait par exemple sa subtilité d’analyste pour dégager les implications d’un mot comme « chmêta » dont la traduction en français est « se réjouir du malheur d’autrui ».
Le miracle est que par petites touches de 2 pages à peine, elle arrive à suggérer un panorama kaléidoscopique de la Tunisie actuelle, une « radioscopie intime de la société tunisienne » comme dit son préfacier Frédéric Bobin, correspondant du journal Le Monde à Tunis. Et il nous met sur la voie de la complexité des sentiments éprouvés par l’auteur en disant qu’elle oscille « entre tendresse et aversion ». En fait c’est de deux Tunisies qu’elle nous parle à la fois, celle qu’elle a connue avant, dans son enfance et dans sa jeunesse, et celle dans laquelle il lui faut vivre maintenant, vaille que vaille, la Tunisie actuelle dont la dégradation est si pénible à constater au quotidien.
Elle évoque souvent ce moment clef qu’a été dans l’histoire contemporaine de son pays l’épisode de janvier 2011(14 ans déjà !) de type révolutionnaire et que d’aucuns appellent la Révolution du jasmin. Mais elle se situe plus souvent dans ce qui a suivi c’est-à-dire le présent, et son sentiment exprimé sans violence n’en est pas moins clair : ce présent est déplorable, la peur du lendemain s’est généralisée dans la population, alors qu’un des mots d’ordre de janvier 2011 était justement « plus jamais peur » ! Et elle évoque avec chagrin l’une des conséquences de cet état actuel du pays qui est le désir des jeunes d’émigrer « vers l’autre rive ».
Un autre aspect de ses activités actuelles relève du féminisme, dont on la sent militante même si elle garde pour en parler sa discrétion habituelle. Se situant dans la suite du travail accompli en son temps par le Président Bourguiba, elle revendique un acquis essentiel et qu’il faut sauver à tout prix : la mixité. Sur celle-ci, qui fut introduite en Tunisie au milieu du 20e siècle, pèsent de terribles menaces, comme le prouvent les attaques subies par la joueuse de tennis Ons Jabeur « symbole de la Tunisienne libre et forte » et copieusement injuriée par les tenants d’une morale religieuse parce qu’elle ose s’exhiber jambes nues devant le public.
Emna Belhaj Yahia qui se situe délibérément entre Orient et Occident constate autour d’elle la montée de l’anti-occidentalisme et le populisme grandissant. Ce n’est évidemment pas un hasard si le dernier mot dont elle fait le commentaire est « humour », génie de la blague et refus de se prendre au sérieux. On dirait bien qu’en cet humour réside aujourd’hui « la seule petite lueur » qu’elle aperçoit au sein d’une « longue nuit ».
Denise Brahimi

« AMENORRHEE » par Sarah Haidar, Blast, 2025
Quiconque s’intéresse à la littérature algérienne contemporaine a forcément entendu parler de cette auteure tant sa singularité provoque l’intérêt el plonge nombre de lecteurs dans la stupéfaction. Née en 1987, elle a d’abord écrit en arabe et rédigé en 2013 son premier récit en français. Ses œuvres ont créé la surprise par leur audace à dire vrai sidérante, sans qu’on puisse la réduire aux sujets abordés car on est frappé autant ou davantage par son écriture ; et ce d’autant plus qu’elle joint deux qualités souvent opposées, d’une part une grande crudité de l’expression, volontiers ordurière, injurieuse et agressive, d’autre part une invention poétique et une créativité langagière dignes d’admiration car on les trouve rarement à un tel degré.
Rien n’est commun chez cette écrivaine. Le titre ici choisi, « aménorrhée » est un mot assez rare à cause de son origine grecque qui explique sa graphie : il signifie l’absence de règles menstruelles chez une femme en âge d’en avoir, l’explication la plus simple étant la grossesse qui interrompt la menstruation. Et c’est bien de grossesse et de sang qu’l s’agit dans ce livre qui comporte de très nombreuses indications physiques concernant le corps des femmes principalement mais pas seulement car le sperme est aussi très présent. Dans ce domaine, l’évocation la plus fréquente est celle de l’embryon humain tel qu’il est lorsqu’on le retire du corps maternel pour opérer un avortement et qu’il devient une sorte d’ordure rejetée parmi d’autres dans un sac poubelle rempli de fœtus. Evocation horrifique, évidemment !
Cet accent mis sur la procréation ou son refus est à mettre en rapport avec le double métier exercé par la femme qui est le personnage principal du livre. Elle est à la fois accoucheuse occupant un poste élevé dans une maternité où son autorité est reconnue, et en même temps mais à titre évidemment clandestin avorteuse pour les très nombreuses femmes qui veulent se débarrasser d’une grossesse inopportune.
Dans sa seule personne cette femme réunit deux attitudes contradictoires sur la maternité : très réticente à son égard elle l’a d’abord rejetée et a voulu avorter ; finalement elle a gardé l’enfant, une fille, qu’elle élève à sa manière et dont il s’avère très vite qu’elle sera elle aussi un personnage atypique, cynique et révoltée.
Les ambiguïtés de la femme à l’égard de la maternité sont dues au fait que celle-ci est provoquée par l’homme et renvoie à l’emprise que la sexualité masculine dominatrice exerce sur la femme. Il y a dans « Aménorrhée » un grand nombre d’affirmations féministes des plus virulentes qui soient à l’égard des hommes. Le personnage du mari, préfet de son état mais dans un pays qui n’est jamais nommé, n’en a pas moins la parole à son tour (comme pour manifester un souci d’équité ?) et essaye de commenter son désarroi, notamment en présence du psychanalyste auquel il a recours. Celui-ci est aussi l’un des personnages à part entière de ce livre pluriel, d’autant plus qu’il est à la fois l’analyste de la femme et celui du mari. Cependant, il est dénoncé par l’auteure du livre autant que par lui-même pour sa totale impuissance à soigner qui que ce soit.
Il y a encore quelques autres personnages qui font entendre leur voix, dont l’assistante de l’avorteuse-accoucheuse qui finalement la dénoncera ; et aussi une sorte d’ « infiltrée » chargée d’espionner celle qu’on finit par suspecter d’être une éventuelle avorteuse. Le roman donne l’impression d’être foisonnant, lieu de tensions extrêmes agité par la parole des femmes qui sont volubiles, emportées par un besoin extrême de dire et de dénoncer. Cette expression outrancière est surtout le fait de l’accoucheuse-avorteuse dont la qualité principale est un humour féroce, terrible mais souvent drôle, toujours d’une implacable lucidité. Elle parvient à poétiser le mépris, le dégoût, et mêle des éclats somptueux aux plus dégoûtantes évocations. Et c’est justement cela, cette écriture sidérante qui fait la singularité remarquable d’ « Aménorrhée ».
A la recherche de rapprochements qui peuvent aider à aborder un tel livre, on en trouve au moins un autre, qui reste emblématique du surréalisme dans sa force première, avant qu’il ne se soit affadi et banalisé. Ecrit en 1868, il s’intitule « Les Chants de Maldoror ». C’est un ouvrage poétique en prose et en français de l’écrivain franco-uruguayen Isidore Ducasse, connu sous son nom de plume comme le Comte de Lautréamont. Généralement considéré comme inclassable, il met en avant un héros révolté, féroce et criminel, et l’on s’accorde à dire que c’est un des textes les plus surprenants de la littérature francophone. Celui de Sarah Haidar ne manque pas de points communs avec lui.
Denise Brahimi

« JE ME REGARDERAI DANS LES YEUX » par Rim Battal, éditions Bayard li (littérature intérieure), 2025

Bien que ce premier roman soit très récent puisque paru en ce début de l’année 2025, Rim Battal est loin d’être une écrivaine débutante, elle a 37 ans, et a publié plusieurs recueils de poèmes, alors même que l’écriture n’est pas son seul domaine d’action et d’expression. Après des études de journalisme, elle est devenue artiste, notamment par goût pour la photo artistique, et elle s’est fait connaître par plusieurs expositions. D’origine marocaine (née à Casablanca), Rim Battal est aussi très française, elle vit à Paris, elle s’est manifestée aux côtés de Leïla Slimani et son but principal sinon unique, comme on peut le voir dans son roman, est de persuader les femmes marocaines qu’elles doivent affirmer leur liberté, devenir elles-mêmes grâce à la connaissance et à la maîtrise de leur corps sur lequel personne au monde n’a le moindre pouvoir de contrôle ou d’intervention.

Ce dernier point est pour elle de la plus grande importance, il est l’impulsion première qui l’a poussée à écrire « Je me regarderai dans les yeux ». Loin de le présenter comme un récit détaillé d’enfance et de jeunesse, elle choisit au contraire de le centrer sur quelques épisodes, peu nombreux mais intensément significatifs. Et parmi ceux-ci, elle fait une place de choix à ce qui s’est passé pour elle lorsqu’elle avait 17ans—et paraissait d’ailleurs en avoir moins, étant menue, de formes physiques peu affirmées, à la différence de son caractère qui lui semble l’avoir été très tôt et beaucoup !

C’est donc à l’âge de 17ans qu’elle découvre l’oppression et la contrainte que sa famille fait peser sur elle, dans le contexte d’une société globalement coercitive, et d’une manière qu’elle déclare totalement absurde, pour ainsi dire inconcevable. Le point de départ de cette découverte très humiliante paraît infime et dérisoire : elle a été surprise par sa mère en train de fumer une cigarette à la fenêtre de sa chambre ! Il s’ensuit des mesures de rétorsion qui vont décider de toute l’orientation de sa vie jusqu’à aujourd’hui.

Au cours de ce même épisode, sa mère l’a frappée avec une violence inouïe et prolongée qui aurait pu lui faire perdre la vie sans l’intervention du reste de la famille dont son père. La violence qu’elle évoque est à la fois physique et verbale, elle comporte des bordées d’injures incroyablement grossières, sidérantes de la part d’une mère. Viendra plus tard une explication, plutôt aggravante : la mère reproduit ce qu’elle a subi elle-même, il s’agit de transmission familiale, et elle est accablante dans une famille traditionnelle comme celle-ci.

Parmi les humiliations insoutenables, celle qui provoque les protestations les plus indignées de Rim Battal est l’exigence d’un certificat de virginité délivré par une spécialiste patentée de ce type d’examen : même sa tante que la narratrice croyait libérale et d’idées avancées lui demande d’y consentir ! Et le roman commence, d’emblée, par l’évocation crue de la manière dont la doctoresse a procédé, brutale et forcément traumatisante ! L’auteure et narratrice n’est pas près de l’oublier.

Cependant, à partir de là, elle entre dans une nouvelle phase de sa vie, où elle s’octroie nombre de libertés, sorties nocturnes, danses effrénées, boissons alcoolisées sans modération, une seule liberté étant exclue, celle de faire l’amour et de perdre sa virginité. Il est très important pour elle de réfléchir à la manière dont cet acte pourrait se passer, tant il est vrai qu’il est fondamental dans la société où elle vit. Après les événements de ses 17 ans, son attention est restée centrée sur les rapports qu’elle entretient avec son corps, et c’est de façon très réfléchie, nullement improvisée, qu’elle s’emploie à les gérer.

Elle découvre d’abord la jouissance, puis la pénétration, qui peut conduire au mariage mais pas nécessairement. Il n’est pas admissible que celui-ci soit imposé, et l’on voit bien comment dans son cas personnel elle en fait l’objet de débats, de négociations et d’entente avec le partenaire choisi. La narratrice a eu la chance de le trouver, on apprend ensuite qu’elle l’a épousé et qu’ils ont eu ensemble un enfant, mais l’essentiel a toujours été que toute contrainte soit exclue.

La formule-titre « je me regarderai dans les yeux » peut paraître étonnante, en tout cas rare : Rim Battal l’emploie pour dire la volonté de transparence à soi-même sans hypocrisie, de maîtrise de soi sans zone d’ombre et sans non dit. On est frappé par l’aisance avec laquelle elle aborde des sujets qui sont difficiles même en dehors du contexte traditionnel marocain, et par le caractère très direct de ses propos, sans fioriture ni diversion. On ne saurait dire pour autant qu’un tel texte soit impudique alors que les pratiques traditionnelles telles que le certificat de virginité le sont aux yeux de la narratrice, qui joue brillamment de ce renversement des positions. Il est clair que pour elle, une certaine notion de bienséance n’existe pas et sans doute s’amuse-t-elle de créer par là un certain effarement, C’est en tout cas l’occasion de réfléchir aux effets inévitablement pervers de la répression dans le domaine sexuel. Rim Battal a décidé de s’en libérer complètement, cela fait partie de son choix, qui est de devenir « artiste et poète ».

Denise Brahimi

« NOTRE DIGNITE » par Nesrine Slaoui, éditions Stock, 2024

Nul ne peut rester indifférent au livre de Nesrine Slaoui. Elle s’exprime avec une grande force de conviction en se situant sur un double terrain : d’une part, celui des faits et des certitudes fondées sur l’analyse précise voire chiffrée d’un certain nombre de réalités, d’autre part celui de l’expérience personnelle et de l’intimité qu’elle aborde avec un naturel et une franchise assez surprenante. Ses affirmations s’appuient sur beaucoup de références, de modèles, de rencontres ; ses lectures sont nombreuses, elle n’a rien oublié de ce que lui a appris son passage par Sciences Po ; mais elle puise aussi dans un vivier beaucoup plus populaire, constitué par les réseaux sociaux, les téléfilms et son travail de journaliste-documentariste ; plus que des opinions, ce qu’elle en ramène sont des constats souvent sidérants. On sait que la téléréalité et les réseaux sociaux font un mal considérable, mais on découvre dans « Notre dignité » que c’est encore bien pire qu’on ne croyait !

Nesrine Slaoui, comme son nom l’indique, est partiellement au moins d’origine marocaine, elle est née à Fès en 1994 et cette maghrébinité joue un rôle important dans sa vie pour une raison principale sinon unique : le racisme dont elle est l’objet. Tout au long de son livre elle en donne maint exemple mais il faut dire d’emblée que son appartenance ethnique ne se sépare jamais dans son expérience vécue de son appartenance au genre féminin. Etre une femme est d’autant plus important dans sa vie qu’elle réagit à cette situation par une adhésion active voire virulente au féminisme, défini dans son cas par sa double particularité : elle est femme et elle est maghrébine.

A ce titre l’histoire qu’elle raconte, et fort bien, dans « Notre dignité » peut être considérée comme un parfait exemple de ce qu’usant d’un terme un peu savant on appelle l’intersectionnalité : c’est un aspect récent des luttes menées par les groupes infériorisés contre les dominants, il s’agit de montrer les effets conjoints et décuplés pour les victimes d’au moins deux formes de discrimination. Nesrine Slaoui considère que tel est son cas puisqu’elle subit à la fois les effets du racisme et du masculinisme, renforcés l’un par l’autre et de ce fait particulièrement dangereux. A quoi s’ajoute la pauvreté de son milieu d’origine, qui pourrait la faire apparaître comme transclasse, si elle ne récusait ce terme et cette assignation, trop facilement récupérable comme exemple d’intégration réussie ou transformable en « success story ».

Le sous-titre qu’elle donne à son livre insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas de dénonciations théoriques ni de principe, mais qu’elles découlent directement de ce qu’elle vit : « Un féminisme pour les Maghrébines en milieux hostiles ». Ce que doit vivre une femme comme elle est une guerre, sens premier du mot « hostilité ». Les six chapitres de sa démonstration confirment maint constat officiel en ce début de 2025 : L’affrontement entre les deux genres, masculin et féminin, va grandissant, les agressions entre féminisme et masculinisme sont incessantes—à quoi Nesrine Slaoui ajoute que les femmes maghrébines en France sont au cœur de ce conflit.

Ce qu’elle écrit montre en effet la dangerosité de la situation. Les analyses de détail sont éclairantes, on peut en prendre pour exemple celle du mot « beurette », dont les implications sont liés à l’imaginaire colonial et au regard blanc, malgré son apparence actuelle ; d’où le mot d’ordre « décoloniser le féminisme » et l’affirmation récurrente que c’est un même combat de « lutter à la fois contre le racisme et le sexisme ». Retourner au passé colonial, en montrant l’importance de la prostitution et des fantasmes orientalistes, c’est montrer la continuité entre cette époque et la question si actuelle du voile, et retrouver l’origine du mépris envers les femmes qui est l’inverse même de ce que l’auteure annonce dès le titre de son livre, une revendication de dignité. En quoi d’ailleurs elle ne fait que reprendre un terme qui figure dans un texte officiel tel que le code du travail de 2015, dans sa définition du sexisme  : « Tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ». « Notre dignité » est l’illustration par l’exemple de ce que ces différents termes signifient concrètement.

Dans son 6e et dernier chapitre consacré à «l’intime »,Nesrine Slaoui vire de bord audacieusement et adopte une attitude qu’elle n’a pas eue jusque là, en tout cas pas de manière aussi directe : la confidence personnelle, la narration des conséquences qu’ont eues dans la vie de la femme qu’elle est tout ce qu’elle a décrit précédemment comme propre à la communauté à laquelle elle appartient. De l’objectif au subjectif, elle se meut très librement, revendiquant le besoin de s’exposer elle-même pour mieux « déranger ».Et c’est sur la dignité qu’elle termine, s’identifiant à la superbe jeune femme qui figure sur la couverture de son livre (une photo de « Jeune femme algérienne » vers 1890) : droite comme elle, la tête haute, vulnérable et combative à la fois.

Denise Brahimi

« ENFANCES DE FILLES », Parlement des écrivaines francophones, éditions Chèvre-feuille étoilée, 2025

Ce recueil collectif a été écrit avec le concours de 22 écrivaines de langue française. Il bénéficie d’une introduction de Maïssa Bey, qui précise le but d ’un tel livre, écrit, dit-elle, « non pour se souvenir mais pour devenir ». Dans sa préface, Christine Détrez dit que les articles sont écrits « par des petites filles devenues grandes », très jolie formule pour situer chacune des écrivaines par rapport à son enfance, plutôt revécue que remémorée.
Le Parlement des écrivaines francophones ou PEF, qui a été créé en 2017, est présidé par Fawzia Zouari à laquelle on doit l’un des 22 textes, le dernier pour des raisons d’ordre alphabétique ! Il est intitulé « Enfance magique », titre qui met en valeur la volonté d’en finir avec le réalisme documentaire. Mais il s’agit de son choix personnel, plutôt que d’un trait dominant dans le recueil.
Chacune des auteures du livre a droit en fin de volume à une biobibliographie. Les textes, qui portent des titres (rien d’étonnant à ce que beaucoup d’entre eux comportent le mot « enfance » !), sont de longueur variable, le plus souvent entre 5 et 10 pages. De cette manière, le recueil est d’une grande lisibilité et sa lecture suivie donne le sentiment évidemment plaisant d’une grand diversité, l’ordre alphabétique de la présentation ayant évité la recherche de thématiques forcément réductrices.
Cette diversité est de plusieurs ordres, et d’abord ethnique, étant donné cependant que le trait commun à toutes les auteures est l’emploi de la langue française. Les Africaines sont très présentes dans le livre, qui s’ouvre par un texte situé dans la forêt équatoriale du Cameroun. Et aussitôt après, on se trouve plongé.e dans la petite bourgeoisie de la province française. On a droit chemin faisant à d’autres évocations aussi diverses que celle du Liban ou de Madagascar.
Les milieux sociaux, même dans un seul pays (la France) sont eux aussi variés, mais quelques remarques se font jour. Les catégories les plus pauvres de la population mondiale ne sont pas représentées. S’agissant des Africaines, on peut même dire que les écrivaines du recueil appartiennent à des milieux très favorisés, ce qui s’explique fort bien, tant il est vrai que les autres n’ont pas eu accès à l’écriture et à la littérature. En revanche pour ce qui est des écrivaines de France, on peut parler globalement d’un milieu petit-bourgeois sans que ce trait donne lieu à des analyses sociologiques particulières ; on dirait plutôt qu’il représente, si l’on peut dire, une sorte de banalité.
De toute manière, comme on pouvait s’y attendre et quel que soit le lieu, un rôle majeur est attribué à la lecture et à l’école ; et ce n’est pas un hasard puisque « les petites filles devenues grandes », en grandissant, sont aussi devenues écrivaines : leur histoire est forcément liée au rapport qu’elles ont eu avec les mots.
La diversité est aussi celle de appréciations portées par ces femmes, adultes de longue date, sur ce qu’a été leur enfance. Il y a incontestablement une tendance à ce qu’on peut peut-être considérer comme une idéalisation, l’enfance apparaissant comme le lieu du bonheur, tout simplement et sans même qu’il y soit besoin d’amours comme dans l’admirable vers de Baudelaire : « Mais le vert paradis des amours enfantines… »
Cependant on voit aussi apparaître des tonalités plus sombres dans les évocations de certaines écrivaines. La propension de tel grand-père à des caresses abusives rejoint les innombrables dénonciations que nous donne à entendre notre époque et certes il n’y a rien là de bénin, mais la dénonciation féministe de style « MeToo» n’est pas le ton dominant du livre ; lorsqu’il y est question d’inceste, c’est à propos des fantasmes d’une mère ou de ses hantises mais il est bien dit qu’ils ou elles sont injustifié.e.s.
D’une manière générale, il est intéressant de constater que les retours sur ce que l’enfance a d’angoissant sont présents dans ce livre mais qu’ils restent l’exception. On dirait plutôt que le parti pris a été (avec ou sans entente préalable entre les écrivaines) de ne pas gâcher le plaisir de l’écriture et de la lecture. Plaisir du texte, certes, et le talent de certaines écrivaines est impressionnant, mais ce qui compte le plus est la justesse irremplaçable du souvenir vécu de chacune ou plutôt du passé revécu à travers son évocation.
Denise Brahimi

« RENDEZ-VOUS AU MONT SAINT-MICHEL » par Ahmed Benzelikha, éditions Hibr, 2023
Ce titre un peu énigmatique donne à penser qu’on va avoir affaire à une fiction, sorte de fable qu’on ne saurait appeler roman bien que s’y meuvent un certain nombre de personnages qui pour l’essentiel sont des figures (plus ou moins grimaçantes) de notre modernité.
En fait le début de l’histoire remonte de plusieurs siècles à travers le temps, on se trouve en Andalousie, aux beaux jours de « l’andalouse et lumineuse Cordoue » et on fait connaissance avec un personnage nommé Andréas, architecte de son état. Sa compétence est telle qu’il est convié à venir travailler loin de son origine, dans un lieu de France situé aux confins de la Bretagne et de la Normandie, le Mont Saint Michel connu pour sa remarquable abbaye : celle-ci a besoin d’être reconstruite, la foudre l’ayant dévastée. Le travail sur ce site ne peut que convenir à Andréas qui est un fervent chrétien, il y est accueilli par l’abbé Roger II et y vit pendant cinq ans d’une vie semblable à celle des moines mais meurt accidentellement.
L’action nous transporte alors, sans crier gare, à travers l’espace et le temps, et c’est ainsi que nous nous retrouvons à l’époque contemporaine dans l’île d’Ibiza qui comme on sait fait partie de l’Espagne et a connu depuis quelque temps un essor touristique tout à fait remarquable, qui en a fait un haut lieu de la vie mondaine internationale. Bonne occasion pour l’auteur de décrire une partie de cette faune des plus variées, liée à des aventures à la fois sensationnelles et éphémères comme celle qui fait l’objet principal du récit que Ahmed Benzelikha s’amuse à raconter. Peut-être en a-t-il connu quelques aspects dans la réalité, lui qui, né à Constantine, a exercé en divers lieux plusieurs métiers liés au monde de la finance et de la communication, ce qui ne l’empêche pas d’être aussi écrivain.
En tout cas, dans ce monde extravagant et un peu frelaté d’Ibiza, nous sommes mis en présence d’un personnage assez singulier appelé Maître G, célèbre médium, c’est-à-dire doué d’un pouvoir exceptionnel de percevoir ce qui échappe aux gens ordinaires et normaux. Il se fait appeler Maître car il a pris la tête d’une secte qu’il a bien l’intention de rendre toute puissante, avec l’aide de la haute politique internationale. Il a déjà réussi à mettre celle-ci à son service, en la personne du Gouverneur de ce qui dans le livre s’appelle l’Alliance, sorte de coalition des Etats les plus puissants, en Europe occidentale en tout cas. On peut certainement dire de Maître G qu’il est un mégalomane de première grandeur, possédé par un désir sans frein et que d’aucuns diront démentiel de puissance et de gloire, mais le fait est que jusqu’à la fin du livre ou presque, il donne consistance à ses fantasmes et semble voué à un succès illimité.
Autour de Maître G et de sa secte La Féérique (ne faut-il pas faire rêver ?) gravite un certain nombre de personnages tel que le couple formé par Darcos et Fiona, très amoureux l’un de l’autre au moins provisoirement. Elle est une artiste mondaine admiratrice de Maître G, lui un spécialiste du renseignement et de la protection rapprochée, dont on comprendra qu’il est chargé entre autres de contrôler les agissements du Maître.
A Ibiza on trouve aussi des candidats à l’émigration clandestine tels que Youssoufa et Gnaoui, qui ne réchappent pas forcément aux risques de leur tentative mais qui peuvent aussi, le cas échéant, y trouver un assez bel avenir. Ce dernier cas est celui de Gnaoui qui va entrer au service de l’Alliance, l’intelligence artificielle aidant à sa formation : tant il est vrai que le roman d’Ahmed Benzelikha est en pointe de la modernité. Il n’y manque même pas un personnage de redoutable « influenceuse », une certaine Greta Amalo dont c’est trop peu dire qu’elle est remarquable par son absence de scrupules, ce qui fait que de toute façon et quoi qu’il en soit elle tire fort bien son épingle du jeu.
Il existe cependant, mais ce ne sera qu’une tentative vouée à l’impuissance, une tentative de résistance à ces ambitions féroces et illimitées, c’est celle de l’Eglise catholique et du Vatican, ici représenté par un certain Monseigneur Léon, dont ce serait peut-être trop dire qu’il est animé par un souci d’ordre moral, mais qui estime que les projets de Maître G sont inacceptables et vont trop loin. De toute façon, ce n’est pas lui qui finalement leur mettra un terme.
Le projet mégalomane ayant pris la forme d’une immense opération de prestige au Mont Saint Michel (que l’on retrouve ici finalement), c’est une nonne à la fois courageuse et compétente qui va faire capoter le projet au beau milieu de sa réalisation. Ouf, on se doutait bien que cet échec finirait par arriver ! Maître G connaît la fin qu’il mérite, mais comme ce récit est une fable et non une histoire réaliste, l’auteur peut imaginer que son personnage ressuscite, tant il est vrai que l’ambition du pouvoir est indéracinable ! En attendant la statue dorée de l’Archange continue à menacer le mal de son épée au sommet du Mont Saint Michel …
Denise Brahimi

« LE COIFFEUR AUX MAINS ROUGES » par Kébir M.Ammi, roman, Elyzad, 2025

L’auteur de ce petit livre est un écrivain fécond ; né en 1952, il a déjà de nombreux livres à son actif. Son origine algérienne et marocaine ne l’empêche pas d’être avant tout un écrivain français !

Dans quelle catégorie ranger ce « coiffeur aux mains rouges » ? Etant donné que les événements les plus marquants qui s’y produisent sont deux crimes, aussi horribles l’un que l’autre, sans que l’on sache d’emblée par qui ils ont été commis, on pense évidemment à un roman policier, où il s’agirait de retrouver les deux coupables (qui appartiennent à deux générations différentes ) mais de toute façon le mot « policier » serait usurpé car la police ne joue pas le moindre rôle dans cette recherche, et à dire vrai, rien n’est fait par l’auteur pour maintenir le ou les mystères : chaque fois qu’il y a un indice, il conduit inévitablement dans la même direction, il n’y a pas plusieurs pistes à suivre entre lesquelles on pourrait se sentir égaré, on s’achemine forcément vers la vérité même s’il est vrai que les explications qui finissent par s’imposer paraissent difficiles à croire.

Ces difficultés ne sont pas liées aux actions elles-mêmes mais à certaines évolutions psychologiques par lesquelles les personnages ont été amenés à les accomplir. Tout se situe dans un contexte de violence historique qui est la véritable originalité du roman. Kebir M. Ammi revient sur d’inévitables règlements de compte dont on a en fait assez peu parlé sans doute parce qu’il paraissait plus opportun (politiquement) de les occulter. La fin de la Guerre d’Algérie décrétée par les accords d’Evian en mars 1962 ne pouvait effacer instantanément ni même dans une plus longue durée les exactions commises par l’OAS et le besoin de revanche qu’elles avaient laissé chez les Algériens. On a souvent parlé à cause des faits historiques qui s’en sont suivi des tentatives de l’OAS pour prolonger ses combats devenus d’autant plus sanglants que désespérés. Kébir M.Ammi, lui, a choisi de s’intéresser aux actions vengeresses menées par les Algériens en France après l’indépendance, comportant à la fois la recherche des meurtriers venus s’y réfugier et l’exécution par certains d’une vengeance impitoyable, parfois longuement attendue et préparée.

C’est à un cas de ce genre que nous assistons dans l’histoire du « coiffeur aux mains rouges », à une différence près mais elle est de taille : l’auteur ne met pas l’accent sur l’exécution et les éventuelles difficultés de l’entreprise vengeresse, il se contente de laisser entendre qu’elle est devenue obsessionnelle pour celui qui va la mener à ses fins. Mais ce qu’il pose est un autre problème, d’ordre moral pourrait-on dire : y a-t-il un sens à se venger d’un homme qui a complètement changé depuis le crime qu’il a commis ? Le livre s’ouvre sur une citation nous invitant à considérer chaque homme comme un inconnu, inconnu à lui-même sans doute autant qu’aux autres et susceptible de devenir une personne différente lorsque passe le temps. L’homme qui va payer pour son crime passé était abominable et cruel, puis est venu le temps où il a travaillé à sa propre expiation, et il est désormais depuis longtemps connu de tous comme un homme bon, respectueux des valeurs humaines, ne laissant dans sa vie aucune place au mal éventuellement commis par d’autres, étant hors de question qu’il le commette lui-même.

La question que pose l’auteur va au-delà d’un plaidoyer en faveur du pardon, c’est plutôt une dénonciation des abus entraînés par la mémoire, et surtout d’une certaine conception de celle-ci qui ne peut que s’avérer néfaste. Ce à quoi on assiste dans le livre est la reproduction à l’identique d’un acte commis dans le passé, on dirait qu’il s’agit d’une sorte d’exorcisme, et il apparaît clairement que cette fixation sur l’identique signifie négativement l’incapacité à évoluer. Lorsqu’il s’agit d’un crime jadis commis par l’OAS, le problème posé est collectif, mais le roman montre la même chose dans l’histoire d’un individu, ici le narrateur, qui ne parvient pas à dépasser sa haine pour son père, alors que celui-ci fait tout pour renier son propre passé et le laisser derrière lui.

On voit que les problèmes posés ne sont pas simples et l‘auteur prévient d’ailleurs que pour lui non plus, tout n’est pas clair dans l’histoire qu’il raconte ou dans ses personnages. Mais il se trouve qu’en même temps, il est doué d’une manière fluide de raconter, qui fait qu’on le suit très facilement. Il y a là une sorte de paradoxe qui fait la singularité du livre, au titre feuilletonnesque qui semble emprunté à la littérature populaire alors qu’il s’attaque aux problèmes de conscience les plus ardus posés par l’histoire.

Denise Brahimi

« ALGER », réalisateur Chakib Taleb-Bendiab, Temple Production, 2024

C’est un film policier, réalisé par quelqu’un qui aime ce genre, y compris dans ses conventions et ses poncifs, et qui se sent capable de le traiter sous une forme moderne, de manière convaincante. Il y parvient en effet, « Alger » ne donne pas le sentiment de routine et de déjà vu, mais au contraire de réussite, et l’on a plaisir à le suivre, dans le détail apparemment assez simple de ce qu’il propose, sans préjuger du lieu où nous conduisent le scénario et la nature des événements.
D’emblée on assiste à l’enlèvement d’une fillette, très rapide, par une voiture qui disparaît dans le quartier ; et l’on entend bientôt à la radio l’annonce qui en est faite. La foule se jette précipitamment sur un supposé coupable, Fouzi, soigné dans un hôpital psychiatrique et qui habite à ses heures dans un parking. Il échappe de peu au lynchage. Le plus grave est que l’un des policiers chargé de l’affaire, Khaled, est tout prêt à adopter lui aussi cette facilité et à se contenter d’une enquête banale et bâclée, alors même que Fouzi est forcément innocent puisqu’il était à l’hôpital au moment où l’enlèvement s’est produit.
Heureusement les deux personnages principaux du film, qui eux sont exigeants, vont s’y opposer. Il s’agit de l’Inspecteur de police Sami, encore jeune, et que le public algérien connaît en tant qu’acteur parce qu’on le voit souvent à la Télévision — c’est lui qui jouait le rôle principal dans le film de Merzak Allouache « Le repenti ». De l’Inspecteur Sami, on sait d’emblée qu’l ne cédera pas, d’autant qu’il est soutenu et même davantage par l’autre personnage, féminin cette fois, qui est Dounia : c’est une psychiatre, envoyée sur les lieux de l’enquête pour l’éclairer éventuellement de ses compétences. Elle est très intuitive, on pense en la voyant (on n’en saura pas plus) qu’elle a vécu personnellement l’expérience de la douleur, qui fait d’elle une femme blessée. Malgré son caractère peu aimable, Sami « l’inspecteur bourru» (le réalisateur s’appuie ostensiblement sur les clichés) se persuade assez vite que Dounia a raison : la conviction de celle-ci est que l’enlèvement est l’œuvre d’un kidnappeur en série, qui a déjà agi plusieurs fois par le passé, sans s’éloigner de ce même quartier d’Alger qu’il connaît parfaitement bien et où il vit caché. Elle s’appuie sur une recherche dans des dossiers anciens remontant à une vingtaine d’années, 1999 étant semble-t-il une année clef. C’est dire si l’enquête est difficile, mais on comprend vite que Dounia la mènera jusqu’au bout, aux côtés de l’Inspecteur Sami (quelle que soit la discrétion avec laquelle leur relation est évoquée). Ils ont en commun, même si chacun la vit à sa manière, une profonde pitié pour les petites filles victimes de ces enlèvements. Le réalisateur a su trouver les deux acteurs qui convenaient pour rendre plausible voire bouleversant leur sentiment d’empathie : aux côtés de Nabil Asli qui joue Sami, c’est Meriem Medjkane qui est la psychiatre spécialisée dans des affaires criminelles comme celle-ci, et le réalisateur fait confiance à son interprétation qui est riche d’émotions contenues. Il y a une scène, à la fin du film, où la tension dramatique, grâce à elle, est d’une grande intensité : il lui faut convaincre une jeune femme, ex-victime du kidnappeur et devenue son épouse et complice, d’échapper à l’emprise de celui-ci pour sauver la dernière des petites filles enlevées, encore vivante heureusement. C’est un moment très fort du film.
L’autre personnage d’« Alger », si l’on peut dire les choses ainsi, est la ville elle-même très présente mais de façon originale. La géographie du quartier où se passe l’action échappe à toute forme de pittoresque, ni ancien au sens orientaliste du mot, ni moderne comme pour démentir le premier. Ce renouvellement de la présentation vient du fait que toute l’action se passe en 48 heures et qu’il y a beaucoup de scènes de nuit, qui permettent de montrer le paysage urbain autrement, en lui restituant un certain mystère, conforme à la volonté exprimée par le réalisateur de faire un thriller algérois. Sa façon de procéder confère à la ville une légère abstraction ou étrangeté qui évite son enfermement dans une forme connue (donc reconnaissable donc familière) et lui donne au contraire une possibilité de généralisation.
Le retour en arrière d’une vingtaine d’années n’est évidemment pas anodin, puisqu’il ramène par la pensée à la fin de la tristement célèbre décennie noire. Retour difficile pour des raisons psychologiques évidentes, et d’ailleurs officiellement interdit par l’Etat. Le réalisateur se garde bien de rappeler des faits historiques qui ont ce statut bizarre d’être la fois présents et absents dans les mémoires, il n’en est pas moins évident qu’il s’agit pour lui de savoir où en est Alger vingt ans plus tard. Le passé récent d’Alger est anxiogène et le film se garde bien de le nier ou de l’ignorer, cependant il signifie que la période actuelle doit trouver un moyen pour éviter que ce passé n’empiète sur la réalité présente ou n’empêche toute vision de l’avenir. Le passé avec son lot de criminels comme le kidnappeur doit être extirpé voire exorcisé, c’était une horrible histoire mais le but à poursuivre est d’empêcher qu’elle ne se prolonge maintenant. Il faut à la fois le courage de l’enquête et celui du dépassement. Oui il y a matière à un thriller, et il est tout à fait possible de le traiter ainsi, mais il ne s’agit pas d’un pur divertissement.
Denise Brahimi

Ce très beau film n’a pas à ce jour trouvé de distributeur en France. Il sera projeté le 19 mars au cinéma Les Amphis de Vaulx en Velin. En espérant qu’il soit rapidement visible sur les écrans français. MW

 

 

 

Note : Pièce de théâtre « LA FRACTURE » de Yasmine Yahiatène, Théâtre Nouvelle Génération Lyon

Le TNG de Lyon a programmé ce spectacle du 11 au 14 février à Lyon, dans la petite salle des Ateliers de la Presqu’île.
« Entre performance vidéo et monologue vibrant, Yasmine Yahiatène cherche à comprendre ce que son père lui a toujours tu de ses origines kabyles. Une quête d’identité à vif, qui mêle histoire intime et rapport politique au monde ».
La jeune comédienne et auteure de cette pièce nous propose une remarquable et très courageuse et touchante performance.
Pendant que le public prend place, la jeune femme, en short et Tshirt dessine au sol avec des marqueurs blancs les limites d’un terrain de football. Quand le traçage est terminé, elle sort méticuleusement d’un sac un camescope et des cassettes de film qu’elle dispose avec soin. Elle enfile le maillot de l’équipe de France de football, celui du numéro 10, Zinedine Zidane, et projette depuis son camescope le dernier but de la finale de la coupe du monde 1998. Elle partage sur la scène avec une gestuelle drôlatique l’explosion de joie dont nous avons gardé le souvenir (et un, et deux, et trois!!!). Elle enchaîne ensuite en comparant la trajectoire du père de Zizou et du sien, nés dans des villages distants d’une centaine ed kilomètres en petite et grande Kabylie.
Puis le camescope projette des extraits de films de famille, des fêtes surtout, où l’on voit le père danser plutôt gracieusement, et surtout servir à tour de bras des plateaux de flûtes de champagne.
Cela nous amène à une interpellation de plus en plus douloureuse de ce père qui ne lui a rien dit de ses origines, de sa langue, de son identité et surtout qui a basculé dans un alcoolisme de plus en plus évident. On apprend qu’il a disparu en 2022.
On entre progressivement dans ce dialogue intérieur, grâce aux mots, au dessin sur le sol qui va peu à peu maculer le terrain de football, et grâce au camescope qui filme la comédienne, projette son visage ou les dessins du sol sur l’écran, ce qui est complété par des effets spéciaux qui se superposent décorant encore plus le propos de l’auteure et comédienne.
Rencontre finale, le visage de Yasmine vient se superposer à celui de son père, faisant apparaître une grande ressemblance, les mots de la fille semblant venir des lèvres du père, en une mise en abîme superbe. « J’ai trouvé trois points communs entre l’Algérie et l’alcoolisme : le silence, le tabou, et la honte. »
L’ingéniosité du dispositif scénique est envoûtante, et vient servir remarquablement le propos de cette quête de sens et de relation impossible. Si nos lecteurs et lectrices ont la bonne fortune de voir ce spectacle programmé dans leur ville, l’auteur de ces lignes n’hésite pas à vous en recommander chaudement la découverte.
Michel Wilson

Note sur « 80 MOTS DU MAROC » de Kenza Sefrioui, L’Asiathèque, 2024
Le petit livre de Kenza Sefrioui ne peut manquer de ravir tous ceux qui sont capables d’apprécier la richesse et la créativité de la langue parlée usuelle au Maroc, la darija.
Bien que ce soit l’une seulement des langues utilisées dans ce même pays, l’auteure considère la darija comme « le dénominateur commun de la majorité des Marocains » et elle juge particulièrement utile de montrer les rapports de « féconde complémentarité » qu’elle entretient avec l’arabe standard.
Avec beaucoup de modestie, elle dit avoir tiré une bonne part de son information de l’énorme travail de recherche accompli par le Français Georges Séraphin Colin, arrivé au Maroc en 1921, « amoureux de l’arabe marocain parlé au début du siècle dernier » dit de lui Zakia Iraqui Sinaceur qui a tiré de ce legs considérable un « Dictionnaire Colin d’arabe dialectal marocain ». Elle est la préfacière de ces « 80 mots du Maroc ».

Pour écrire ce livre, Kenza Séfrioui a repris le contenu d’une rubrique hebdomadaire, « L’essen

ce des mots », qu’elle a publiée pendant 5 ans. Elle a beaucoup puisé dans la littérature orale, adages, proverbes et contes et s’est aussi inspirée de la musique populaire, principalement des chansons à texte de Nass el Ghiwane, groupe marocain célèbre dans les années 70 du siècle dernier.

Pour présenter le riche matériau qui constitue son livre, Kenza Sefrioui a regroupé les mots qu’elle a choisis en une bonne demi-douzaine de thèmes évocateurs, relation des hommes à la nature ou entre eux, conversation, travail commerce et argent, caractères et émotions, les saveurs et pour finir les arts. Elle a aussi rattaché les uns aux autres les termes, parfois fort nombreux, qui renvoient à une même racine. C’est ainsi que ce petit livre donne l’impression d’être foisonnant, souvent drôle, profondément immergé dans la vie quotidienne du peuple marocain.
Denise Brahimi

 

 

 

  • Mercredi 5 mars Intervention mémoires croisées de la guerre d’Algérie à la PJJ d’Autrans (38)
  • Mercredi 5 mars participation à la projection des « Filles d’Olfa » à L’Aquarium » à Lyon 4ème.
  • Jeudi 6 mars Participation à la projection du Film « La mer au loin » de Saïd Hamich Benlarbi au Cinéma L’Opéra de Lyon 1er.
  • Samedi 8 mars Assemblée générale de Coup de Soleil en Auvergne Rhône-Alpes. Lyon.
  • Lundi 10 mars Intervention mémoires croisées de la guerre d’Algérie au Collège Fernand Berthon de Saint-Rambert d’Albon 
  • Mardi 11 mars , Intervention mémoires croisées de la guerre d’Algérie au Lycée Belmont Capdepon de Lyon 7ème
  • Mercredi 12 mars Ouverture des « Rendez-vous des cinémas d’Afrique » au cinéma Mon ciné de Saint Martin d’Hères (38) avec « L’effacement » de Karim Moussaoui
  • Jeudi 13 mars « Rendez-vous des cinémas d’Afrique » au cinéma Mon ciné de Saint Martin d’Hères (38): Film AICHA de Mehdi M Barsaoui
  • Vendredi 14 mars, Conférence de la journaliste Florence Beaugé autour de son livre « Une guerre sans gloire » à la salle Edith Piaf de Vaulx en Velin (69)
  • Dimanche 16 mars « Rendez-vous des cinémas d’Afrique » au cinéma Mon ciné de Saint Martin d’Hères (38): « La langue du feu » de Tarek Sami
  • Lundi 17 mars « Rendez-vous des cinémas d’Afrique » au cinéma Mon ciné de Saint Martin d’Hères (38): « Les enfants rouges » de Lotfi Achour
  • Mardi 18 mars « Rendez-vous des cinémas d’Afrique » au cinéma Mon ciné de Saint Martin d’Hères (38): clôture. « Chikha » de sahoua Raji et Ayoub Layoussifi, et «  »La mer au loin » de Saïd Hamich Benlarbi
  • Lundi 17 mars et Mardi 18 mars Intervention mémoires croisées de la guerre d’Algérie au Collège Marie Curie de Tournon (07)
  • Mercredi 19 mars Projection du film « De pied ferme » de Béatrice Dubell à la Médiathèque Léonard de Vinci de Vaulx en Velin puis intervention de l’historien Niek Pass sur l’histoire du cyclisme en Algérie.
  • Mercredi 19 mars Projection du film « Alger » de Chakib Taleb Bendiab au cinéma Les Amphis de Vaulx en Velin
  • Jeudi 20 mars Théâtre Passeport pour la Liberté de Dominique Lurcel, en présence du metteur en scène, de Samira Belhoumi, personnage central de la pièce et de Stéphane Beaud, sociologue, auteur du livre « La France des Belhoumi » au Rize de Villeurbanne
  • Vendredi 21 mars Conférence de l’historien Niek Pass à La Maison de l’écologie (Lyon 1er). L’histoire du cyclisme en Algérie.

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