Loin des hommes (encore un auteur- dessinateur découvert grâce au Maghreb des livres…)
Tous les commentateurs favorables remarquent la dramaturgie d’un grand western, avec très peu de dialogues sobres, deux grands acteurs, des images saisissantes entre les immenses paysages et les gros plans qui rendent sensible le rugueux de la peau ou de la pierre. Cela permet d’éviter presque toujours le pathos et le grandiloquent, qui ne sont jamais très loin. Pour le scénario, il montre bien ce monde rural algérien fragile au moment où il ne peut qu’être détruit, entre ces nationalistes dont les cadres militaires sont d’anciens militaires français et ce système colonial qui est tout autant une armée de répression féroce qu’une politique scolaire de modernisation que représente l’instituteur : la première classe que l’on nous montre porte sur les fleuves français, la dernière sur l’Atlas, symbole des montagnes de cette Algérie rurale.
Le film s’inspire de la nouvelle d’Albert Camus L’hôte, publiée en 1957 dans le recueil L’exil et le royaume. La BD de Jacques Ferrandez (L’hôte, éditions Gallimard/ Fétiche, 2009) reprend presque sans changement la nouvelle de Camus, que celui-ci situe à une date incertaine (fin des années 1940 ?). La BD, préfacée par Boualem Sansal, met en image ces hauts plateaux aux horizons immenses, où l’on sent la « guerre d’Algérie » qui approche. Le film, lui, se situe au début de cette guerre, ce qui en fait un western. Paradoxalement, il est bien moins sombre que la nouvelle de Camus, car les deux héros se parlent, lient une amitié qui permet à Mohamed, le prisonnier arabe, de partir vers la liberté.
les deux héros