“En finir avec le patriarcat”, café littéraire, 4 février 2018, animé par Yves Chemla, avec Nadia EL BOUGA, Maya EL HAJJ, Malika HAMIDI

Le féminisme des femmes musulmanes ne peut être compris que dans les contextes des pays musulmans ou occidentaux. Les droits acquis ou à conquérir concernent l’héritage, l’avortement, l’homosexualité. Face au mythe de la virilité, à la médicalisation de la sexualité, il faut rendre à celle-ci sa noblesse érotique. Le voile a de multiples significations ambigües au sein des différentes civilisations.

Trois dames présentent leurs livres : deux voiles noirs, un autre rose saumon. Malika présente son travail de sociologue, mené au sein de multiples contacts internationaux et publié aux éditions de l’Aube, hors milieu universitaire. Pour elle le mouvement de libération des femmes doit mélanger étude des textes religieux et philosophie des droits humains. Le rôle des femmes dans les débuts de la transmission de la parole du prophète a été occulté. Les féministes musulmanes doivent travailler dans les contextes différents de chaque pays (quels droits officiellement déjà acquis ? quelle pratique réelle de ces droits ? quelles attitudes face à l’héritage, à l’avortement, à l’homosexualité ?). Les « problèmes » de port d’un foulard sont peu de chose face à ces droits à acquérir. Ces foulard sont utilisés de mille façon par des femmes prises dans des « modes islamiques » depuis 20 ans : la France est le seul pays où ce problème est considéré comme central par certains. Le discours féministe de femmes voilées peut revendiquer l’héritage de femmes qui dans un contexte ancien se sont battues contre le port du voile.

Nadia, sage femme, développe son expérience acquise en consultation médicale : la sexualité est au cœur du combat féministe, face aux mythes de la virilité, présent dans toutes les sociétés, mais particulièrement en milieu méditerranéen et surtout musulman, où le « qu’en dira-t-on » est très prégnant. Là où la médicalisation de la sexualité accentue les problèmes des femmes, il faut redonner sa noblesse à cette sexualité, érotisée comme « danse à deux ». Il faut conquérir desdroits desfemmes dans despays pas un droit de la femme. Quand dans certaines civilisations les hommes se voilent, ils ne connaissent pas la même stigmatisation. Le voile féminin remonte quelques millénaires avant les religions monothéistes, qui ont (quelque peu) diminué l’oppression masculine.

Maya présente un roman assez autobiographique situé dans le vécu libanais : l’héroïne, seule voilée à l’encontre de ses sœurs dans une famille moderne, hésite sur son comportement public, elle qui est peintre de nudités féminines. Veut-elle effacer sa féminité ? Se montrer est-il nécessaire pour vivre vraiment ? Comment s’intéresser à sa propre beauté si on la cache systématiquement ?