La Nièce du Taxidermiste est un premier roman (2022) mais Khadija Delaval n’est pas une toute jeune romancière : Genevoise d’adoption, elle est née en 1973. On n’apprend pas grand chose de plus sur elle sur internet.

Ce roman a certainement un contenu fortement autobiographique mais rien ne le confirme. Il raconte le passage de la narratrice, Baya, de l’enfance à la puberté, dans une tribu familiale tunisienne aisée et excentrique où les nombreux enfants, cousins et cousines, sont laissés à eux-mêmes sous l’autorité des plus âgés. Citons une description de cette famille: « Ce qui retenait surtout mon attention, c’était cette cohésion dans la pagaille, tel que cela avait été le cas toute la nuit. Ma famille. Une sacrée clique de déglingués. Des voyous, des folles, des ivrognes, des lunatiques, des saintes et des éberlués. Des gros, les grands, des petits, des esquintés, mais tous pareils au fond. Convaincus d’être sortis de la cuisse de Jupiter, Un peu comme leur patriarche, mon grand-père. Tous réunis autour d’une vision commune de leur propre importance, de leur origine plus qu’honorable, faisant fi de toutes limites en toutes circonstances ».

Baya est totalement ignorante de son corps et du sexe. Avec l’apparition de ses règles un été en Tunisie, elle passe brutalement du statut de petite fille à celui de proie et se résigne tout d’abord aux expériences traumatisantes qu’elle subit, son seul souci étant de les cacher aux adultes.

Khadidja Delaval

L’autrice fait s’exprimer une jeune fille de ses douze ans à ses quatorze ans en trouvant le ton juste et les réflexions et sentiments vraisemblables pour une enfant de cet âge réfléchissant seule. Même si ce que vit Baya est éprouvant et même inadmissible, le roman se situe toujours du côté de son héroĩne croyant que tout est normal jusqu’à ce qu’enfin elle se révolte et il fait la part belle au cadre méditerranéen euphorique dans lequel elle devient une femme.

Sans doute la « bonne société » tunisienne, plus encore que ses homologues marocains ou algériens, s’appuie sur une diaspora internationale particulièrement étendue.

Nous avons trouvé ce roman remarquable : son thème est original et très actuel, la manière de le traiter est également très originale et le style, très tenu, est bien au-dessus du lot habituel des premiers romans.

On peut noter, accessoirement, que pour une fois la quatrième de couverture donne une idée fidèle du roman qu’elle incite le lecteur à acheter.

Catherine Giffard, Claude Bataillon

Ecouter l’auteure, ethnologue, à la télévision genevoise: https://www.rts.ch/play/tv/12h45/video/rendez-vous-culture-lethnologue-genevoise-khadija-delaval-qui-vient-de-publier-son-premier-livre-la-niece-du-taxidermiste?urn=urn:rts:video:13643780

Et puis chez son éditeur: https://www.leschroniquesdegoliath.com/2022/08/la-niece-du-taxidermiste-de-khadija-delaval/